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Un reportage photographique peut-il être considéré comme une oeuvre collective ?

 

 

 

Avant de se poser la question, il faut vérifier, évidemment, si l’œuvre est originale, qu’elle soit collective, ou non, prise dans sa globalité.

 

Les oeuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie sont en principe protégeables (CPI, art. L. 112-2, 9°) – Le caractère mécanique a parfois rendu difficile la caractérisation de l’empreinte de la personnalité de l’auteur. En outre, la loi du 11 mars 1957 réservait la protection par le droit d’auteur, aux photographies artistiques ou documentaires, introduisant, sur des critères flous, une discrimination en contradiction avec les textes.

 

Un reportage photographique qui répond aux critères d’originalité, peut –il donc être considéré comme une œuvre collective ?

 

 

Le régime juridique de l’oeuvre collective a été institué pour permettre l’exploitation des œuvres par une personne morale ou physique qui assume la responsabilité et le risque éditorial. Il n’y a aucune raison d’écarter le reportage photographique des œuvres collectives, la loi n’édictant aucune exclusion par type d’œuvre.

 

 L’article L. 113-2 du Code de la propriété intellectuelle donne il est vrai une définition très générale de l’œuvre collective  : “est dite collective l’oeuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé”.

 

Plusieurs critères contribuent à définir l’oeuvre collective.

 

En premier lieu, l’oeuvre collective suppose la participation d’une pluralité de créateurs. Un reportage photographique peut répondre à cette condition.

 

 En second lieu, l’oeuvre collective est le fruit de l’activité d’un entrepreneur, personne physique ou morale. Celui-ci assume trois fonctions : il prend l’initiative de la création. Il en assure la direction : cela consiste à
donner des directives aux différents contributeurs, souvent salariés, et à assurer la coordination de l’ensemble.

 

Il faudrait donc, en théorie, que le reportage soit effectué par plusieurs photographes, sous la direction d’un entrepreneur, soit personne physique, soit personne morale, avec des directives précises et consignes données aux différents photographes. En pratique, le cas pourrait donc se rencontrer pour l’élaboration d’un reportage, dans le cadre d’un ouvrage.

 

La principale difficulté, en ce qui concerne l’œuvre collective constituée notamment de photographies, réside en fait dans le point de savoir si la photographie reproduite au sein de l’œuvre a ou non été créée, réalisée, dans la perspective de la création d’une œuvre collective et aux fins d’y être intégrée.

 

Si la photographie préexistait à l’œuvre, et qu’elle n’a pas été créée en vue d’y figurer, alors on doit considérer que cette photographie constitue une œuvre indépendante, qui peut être incluse dans une œuvre collective par le fait d’un contrat passé avec son auteur, qui ne sera pas considéré comme contributeur, mais comme l’auteur d’une œuvre première intégrée à une œuvre composite qui peut très bien être considérée comme une œuvre collective.

 

 A l’égard du photographe, l’œuvre est une œuvre composite, et pour les contributeurs ayant contribué à la création d’autres éléments en vue de la réalisation de l’œuvre globale à laquelle une ou plusieurs de ses photographies s’intègrent, il s’agit d’une œuvre collective.

 

(TGI PARIS, 18 mars 2008 Daniel X/Société d’édition d’Art JOS)

 

 

Enfin l’entrepreneur doit exploiter l’oeuvre sous son nom. En dernier lieu, chacun des contributeurs ne peut revendiquer des droits d’auteur sur le tout car il n’a réalisé d’acte créatif que sur sa propre contribution (CA Paris, 4e ch., 26 juin 1992 : JurisData n° 1992-022354).

 

Attention cependant car si l’oeuvre est le fruit d’un travail concerté et conduit en commun par les contributeurs, alors la qualification d’oeuvre collective sera refusée au profit de celle de collaboration (Cass. 1re civ., 18 oct. 1994, n° 92-17.770 : JurisData n° 1994-001997).

 

On voit bien au total que la qualification d’œuvre collective est une question d’espèce et d’appréciation des faits, in concreto, par les juges éventuellement saisis.

 

A titre d’exemple une maison a été considérée comme œuvre collective,  une plaquette publicitaire, ou une œuvre multimédia.